Joyce DiDonato : “Je n'essaye pas d'imiter Lady Gaga”

Télérama.fr

L’ébouriffante diva du Kansas vient de coucher sa voix pulpeuse et éclatante sur un bouleversant album-concept, “In war & peace”, sorti il y a une semaine. De passage à Paris pour un récital, elle nous livre quelques confidences sur canapé. Où rôdent le souvenir du 13 novembre 2015, le spectre de Cléopâtre, et le péril Trump.

Comment est né le projet « In war & peace » ?

Ma première idée était d’enregistrer une série d’arias peu connues, une sorte de disque de curiosités musicales. Et puis il y a eu les attentats du 13 novembre à Paris. Au moment où cela s’est produit, j’étais au piano, en train de choisir les œuvres, et j’ai été tellement choquée que je me suis dit : « Il faut que je fasse quelque chose ». Mais je ne suis pas un décideur politique. J’ai donc décidé de contribuer en faisant ce que je sais faire : chanter.
Vous avez réuni plusieurs extraits d’opéras baroques, certains très connus, comme le Lascia ch’io pianga de Haendel, et d’autres qui n’avaient jamais été enregistrés (Leo, Jommelli). Qu’est-ce qui, dans ces œuvres, au-delà du livret, exhale les idées de paix ou de guerre ?

J’ai d’abord pensé à des airs que j’avais chantés dans le passé : le Lascia ch’io pianga de Rinaldo, donc, ou le Thy hand, Belinda… du Didon et Enée de Purcell. Puis, en tirant sur le fil, d’autres idées me sont venues. Au final, chaque air contient des éléments liés à la guerre ou à la paix, mais aucun ne reflète exclusivement l’un ou l’autre. Dans l’extrait de Jephta [oratorio de Haendel], que j’ai choisi pour exprimer la guerre en ouverture, la musique est très dure, angulaire, violente. Dans celui de Susanna [autre oratorio du compositeur], où l’héroïne [éponyme] cherche la paix, la musique est au contraire apaisante, comme une douce brise qui caresse les champs. Tandis que dans le Lascia ch’io pianga, c’est une voix, celle d’une captive, victime de la guerre, qui exprime cette idée. Et c’est douloureusement beau.

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